Fraude : déjouer les beaux parleurs…

Criminel_iStock_00000893189Par Sophie Stival

Les Québécois se souviendront longtemps de Vincent Lacroix, Earl Jones et Carole Morinville. Ces fraudeurs ont rudement ébranlé la confiance des petits investisseurs. 

L’Autorité des marchés financiers (AMF) tente depuis quelques années de nous sensibiliser, avec plus ou moins d’adresse, aux risques de fraudes. Avant d’investir, investiguez, nous disait-on en 2009 ! 

Cette année, avant de confier nos épargnes à n’importe qui, l’AMF nous invite à nous poser 5 questions. L’idée est intéressante, mais l’enrobage est toujours le même. On veut frapper l’imaginaire des gens en leur faisant peur. Pourtant, les chiffres sont là pour le prouver, les fraudes financières sont rares. 

S’informer oui, mais pas en prenant les épargnants pour des valises… 


Les chiffres de la Chambre

Bon an, mal an, moins de 1 % des quelque 32 000 membres de la Chambre de la sécurité financière fait l’objet de mesures disciplinaires. Cet organisme protège le public et encadre les professionnels dans le domaine des services financiers et de l'assurance.

En 2010, seuls 40 représentants ont fait l’objet d’une ou plusieurs sanctions de radiation, soit 0,1 % de ses membres (donnée tirée du dernier rapport annuel de la Chambre). Ce chiffre inclut les radiations temporaires d’un mois, faut-il le rappeler.   

Au lieu de faire peur aux gens en affirmant, dans leur publicité, qu’ils courent 560 000 fois plus de risque d’être victime de fraude financière que de gagner le gros lot à la loto, pourquoi l'AMF ne tente pas plutôt de les rassurer? Disons-leur que les cas de fraudes sont rares, bien qu’ils existent. Soit dit en passant, les chances de gagner à Loto Max sont d’une sur 28 millions…

La confiance et la compétence

« Quand on entre dans un cabinet de médecin, on s’attend à voir ses diplômes et les résultats de ses recherches affichés au mur. Ces documents nous inspirent confiance. Si on voyait à la place un trophée des meilleures ventes de pilules décerné par une compagnie pharmaceutique, ça ne passerait pas. » C’est ce que m’a déjà confié en entrevue pour le magazine Conseiller, Robert Frances, le fondateur du Groupe financier PEAK. Il était question dans ce reportage de l’intégrité des conseillers financiers. 

Toute l’industrie du conseil financier est basée sur la confiance et la compétence. Les conseillers le savent très bien. Les investisseurs devraient eux aussi connaître les nombreuses obligations déontologiques et les exigences de conformité auxquelles font face les intervenants des marchés financiers. Un peu plus de transparence serait la bienvenue pour tous.

Poser des questions

Les épargnants ne doivent pas se gêner lorsqu’ils ne comprennent pas les placements que leur propose leur représentant. Il faut poser des questions. Le conseiller doit, dans la mesure du possible, divulguer la façon dont il est rémunéré et les frais auxquels s’engage son client lorsqu’il place ses épargnes dans un produit quelconque.

On peut aussi expliquer aux investisseurs quelle protection existe en cas de fraudes. Si la plupart d'entre eux connaisent la protection de 100 000$ de la Société de l’Assurance-dépôts du Canada, plusieurs ignorent l’existence du Fonds d’indemnisation de l’AMF.

Assurons-nous finalement que la personne qui fera fructifier nos épargnes, qui nous aidera à planifier notre retraite, soit bel et bien autorisée à le faire. Pour le registre des individus autorisés à exercer, il faut consulter le site web de l’AMF (cliquez ici). Pour les planificateurs financiers, on peut aussi consulter le répertoire de l’Institut québécois de la planification financière (cliquez ici).

Selon vous, les épargnants ont-ils des responsabilités à assumer (des questions à se poser) lorsqu’ils investissent leur épargne?

 

Une réflexion sur « Fraude : déjouer les beaux parleurs… »

  1. Caveat Emptor!
    Je crois qu’ultimement, l’épargnant est en plein contrôle de sa destinée. Il doit faire ses devoirs. Mettons que de nos jours, il n’y a aucune excuse. Toutes les informations règlementaires, financières et historiques se trouvent à un clic de la souris.
    Les STANFORD et MADOFF de ce monde ont prouvé une chose, que les riches sont aussi vulnérables que les moins bien nantis à la fraude. Il faut s’éduquer, il faut s’informer, il faut suivre ses affaires. Ce n’est pas parce que l’on paie quelqu’un pour gérer son avoir financier qu’il faut arrêter d’y penser ou pis encore, de penser tout cours.
    Sincèrement, je crois que les fraudeurs s’en tirent tout de même à bon compte. Allez-voir quel traitement on réservait aux fraudeurs du temps de Vespasien ou de Louis XIV.
    Mais que penser alors des frais de gestion ici au Canada. En moyenne, les frais de fonds mutuels sont deux fois plus élevés ici qu’aux É-U. Je trouve ça tout aussi criminel mais parfaitement légal bien sûr. Tout est divulgué ! Comment expliquer le comportement des épargnants canadiens, sinon que par une apathie totale ou de la négligence patente.
    Juste un petit exemple, 10000.00 pendant 20 ans à 6% de rendement dans un reer, vous aurez 32 071 en bout de ligne. Si vous payez 1% de trop en frais de gestion, vous n’aurez obtenu que 26 500 au bout de 20 ans. Le 5 500 manquant, est-ce de la fraude, du vol ou de la stupidité de notre part. Hmmm !!!

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